Pourquoi l'ethnopsychiatrie
Depuis plusieurs années le travail thérapeutique mené avec les migrants issus de cultures à fortes traditions
orales,nous a confronté à la nécessité d’une négociation de notre cadre et de nos représentations avec ceux
de nos patients. L’Ethnopsychiatrie est une méthode clinique qui oblige à une induction thérapeutique
adéquate afin de faire surgir le matériel. Il est nécessaire que le clinicien connaisse à minima les
représentations dont le patient se sert pour signifier sa souffrance et les fonctionnements de soins qui s’y
réfèrent : objets thérapeutiques, énoncés d’étiologies frayant avec les mondes invisibles, techniques de
guérison et thérapeutes traditionnels. Le clinicien en ethnopsychiatrie devient par ce fait un thérapeute
chercheur et observateur. Etre observateur lui permet de laisser agir une pensée autrement expérimentée
que celle de la psychopathologie occidentale, le propulse dans un ensemble de sphères reconnues et définies
par le patient. Etre thérapeute en Ethnopsychiatrie lui donne la possibilité de penser ces espaces, ces
fabrications, ces fonctionnements venus d’ailleurs. Il peut alors s’en servir pour valider ou invalider une
méthodologie apportée par l’ensemble de ces catégories. Dans le cas d’une invalidation, le clinicien devra
inventer d’autres espaces de pensées thérapeutiques. Il devient alors chercheur d’une construction de sens
et d’une théorie de sa propre recherche méthodologique. L’Ethnopsychiatrie permet l’approche
interactionnelle en analysant le fonctionnement même du thérapeute. Durant toutes ces années, cette
méthode clinique a fait ses preuves et semble être applicable à tout type de patient et dans tous les
domaines. J’ai appliqué cette méthode clinique dans le cadre de la prise en charge des patients atteints
de troubles somatiques à l’hôpital général et aujourd'hui, dans le domaine médical, psychiatrique,
socio-éducatif, associatif….
Christine MANNONI